Archive for September, 2010

Call me Madam

Friday, September 24th, 2010

je tiens tout d’abord à poster ici au grand jour mon grand regret d’avoir dénigré le dernier cd d’Arcade Feu lors des premières écoutes.j’ai jugé trop vite, pourtant je devrais le savoir que leurs albums ne suscitent pas mon adhésion immédiate. je me suis encore fait avoir comme une bleue et j’en suis sincèrement navrée. je le referai plus et rien ne m’empêchera d’aller pleurer à leur concert à Lyon en novembre ; j’ai hâte d’écouter cet album en errant à travers Montréal.

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et aussi je suis désolée de pas avoir blogué depuis un mois. que voulez-vous, j’ai bien peur que mes journées de rédaction ne soient pas très glamour. si je vis des périodes d’extases intellectuelles, il reste que j’ai bien conscience de l’aridité de la linguistique, soit-elle appliquée à l’argot militant queer.

lundi passé, j’ai vécu un grand moment d’angoisse. j’angoisse assez rarement de manière aussi ouverte, ce qui ajoute toujours un certain désarroi à mon souci. je ne parvenait pas à savoir si cette boule de béton dans mon estomac venait du litre de café que je venais d’ingurgiter, de la femme kamikaze qui erre dans Paris en toute liberté (en attendant que tou/te-s les personnes dont l’apparence physique s’éloigne trop de celle de b*ric*e h*or*te*feux soient mises à l’écart de la population saine) ou si ce stress venait de mon dernier nouveau boulot dont le début m’était alors critiquement proche.

parce que l’autre fois, très occupée à pas bien avancer sur mon mémoire, en pleine réflexion stérile, j’ai reçu un mail d’un pote qui est lui-même pote avec le mec de la grande prêtresse des cours d’anglais pour gens qui ne sont pas en fac de langue d’une université parisienne. vous me connaissez, toujours prompte à perdre un peu de temps, surtout quand ça n’engage à rien, me suis dit que je pouvais bien postuler. j’ai remis mon CV à jour et je l’ai envoyé.

c’est comme ça que j’ai reçu un appel vendredi, rencontré ladite prêtresse dimanche soir et donné mon premier cours mardi. (cela dit j’estime que mes deux paires d’ami/e-s qui ont parié que je finirais prof de fac n’ont pas gagné. que les choses soient claires : je suis “chargée d’enseignement vacataire”, ce qui veut un peu dire la dernière roue du carrosse, la précaire ultime de la faculté.) autant dire je n’ai pas du tout eu le temps d’investir mon rôle et c’est un peu en touriste que je suis arrivée mardi à 8h30, casquette vissée sur le crâne comme à mon habitude (et j’avais même pas enlevé le badge qui hurle mes préoccupations écologiques “I pee in the shower” après une longue réflexion). une de mes étudiantes m’a abordée sans ambages pour me demander “t’es en master SG*E ?”. j’ai répondu, très légitime dans la nouvelle blague du siècle “non moi je vous fais cours”.

mais passons : j’ai pour mission d’améliorer le niveau de langue d’une soixantaine de scientifiques français/e-s ou chinois/e-s, tou/te-s mauvais/es en anglais à leur façon. je ne comprends pas bien ce qu’ils étudient, ils ne comprennent pas bien mon accent. s’établit alors une symétrie dans l’incompréhension qui ne leur saute visiblement pas aux yeux.

ils montrent tous les signes de soumission à une autorité que je ne revendique ni n’exerce volontairement. c’est pour moi une expérience très déroutante. ils me montrent un respect instantané qui me désarçonne, respect uniquement dû à la présence de mon nom sur la liste de leurs enseignant/e-s. alors bon pour jouer un peu mon rôle, j’écris au tableau, je parle fort et je leur donne des exercices à faire.

je dois ici admettre que le mode de recrutement ajoute à ce sentiment d’irréel que j’ai ressenti en voyant mon nom sur leur emploi du temps. je n’ai eu aucun entretien d’embauche, pas de test d’anglais, aucun point de grammaire à expliquer. on m’a balancée devant des classes sans m’entendre vraiment parler. les quelques phrases échangées le dimanche soir n’ont pas permis à mon interlocutrice de juger mon niveau. et après on s’étonne du piètre niveau en anglais des français/e-s.

mais enfin ce n’est pas là le plus intéressant. me confronter ainsi à des personnes de 20 ans me fait constater que j’étais drôlement jeune il y a 5 ans.